Au 19e siècle, la culture du chanvre a tenu une grande place dans la région. Il s’agit du Cannabis Sativa, de la famille des cannabacées, à ne pas confondre avec son célèbre cousin le cannabis !

C’est une plante annuelle à croissance rapide qui peut atteindre 3 mètres de haut, qui pousse sous des climats et des sols différents et qui a un très fort rendement. De plus, son système racinaire structure le sol et le fertilise, et 1 ha de chanvre absorbe autant de Co2 qu’ 1 ha de forêt !

Dès le Moyen-Age, en Europe, on utilise le chanvre pour le textile, les cordages et voiles des bateaux, le papier et l’huile. D’ailleurs la célèbre Canebière à Marseille tient son nom du provençal « canebe », « cannabis » en latin, perpétuant le souvenir des cordiers installés ici près des plantations de chanvre qui ont occupé les lieux du 14e au 17e siècle (étude de Philippe Ponel, paléo-entomologiste).

Lors des 2 guerres mondiales, ces fibres résistantes ont servi à fabriquer les tenues militaires. Elles ont aussi été longtemps utilisées pour la fabrication des billets de banque. La facilité de culture du chanvre, qui ne nécessite aucun traitement ni engrais et consomme peu d’eau, explique sa très large utilisation. Malheureusement, il a été remplacé par le coton venu des Etats-Unis, très gourmand en eau et produits phytosanitaires.

A Auvillars, c’est le bassin du Pleusin (daté de 1910) et le four dans le pigeonnier du château qui sont les témoignages de cette culture ancestrale.

Avant l’ère industrielle, le processus de transformation de la plante est assez long : les plants coupés étaient immergés dans un bassin de « rouissage » en pleine lumière, pendant plusieurs jours en été, pour que leur décomposition dissolve la pectine et libère les fibres. D’où des odeurs qui expliquent la mise à l’écart du village de ce bassin…Les plants étaient ensuite décortiqués, les fibres rassemblées pour sécher en plein air puis passées au four pour terminer le séchage.

Ce processus convenait pour les voiles ou les cordages mais donnait un tissu assez grossier et rugueux. Une des premières alternatives trouvées a été de plonger les plants dans un mélange de savon et de carbonate de soude, puis dans une solution d’acide acétique pour donner des fibres plus douces et élastiques. Ce procédé chimique est corrosif mais non polluant et non toxique pour les ouvriers.

Dans les années 1980, un procédé naturel utilisant un champignon a été développé et donne des fibres douces et souples (source : wedressfair.fr).

Ensuite, on enlevait l’écorce des tiges à la main : c’est le « teillage ». Puis on extrayait la filasse à l’aide d’une machine à broyer, remplacée au 19e siècle par des « turbines à teiller » capables d’effectuer le travail de 400 ouvriers pour le même laps de temps.

La filasse obtenue était très rugueuse, il fallait alors l’assouplir avec un battoir ou un fer « à espader », puis la peigner avant de la filer au rouet puis à la machine plus tard. On peut voir tous ces outils au musée Papotte à Bligny-sur-Ouche, mais certains particuliers en ont gardé chez eux, comme Brigitte.

Aujourd’hui, la culture du chanvre revient en force. La France est le deuxième producteur mondial avec 78 050 tonnes en 2019, et la Bourgogne fait partie des quelques régions où la production est foisonnante.

Avec l’arrivée de la pétrochimie et des fibres synthétiques, cette production avait très fortement décliné. Si elle renaît aujourd’hui, c’est pour les nombreuses qualités écologiques de la plante et ses nombreux débouchés : alimentaires (l’huile de la graine est riche en omégas-3 et 6, vitamines B et E, minéraux et oligo-éléments), cosmétiques (l’extrait de la graine, ou chènevis, est anti-inflammatoire, anti-atopique et cicatrisant), fabrication de papier, matériaux de construction (légèreté et isolation), industrie textile (cordages, tissus), fabrication de bioplastique, paillage de sol et litière pour animaux. Certaines pièces automobiles sont à base de chanvre et permettent une réduction de masse importante.

Malgré tout, cette culture est fortement encadrée : en effet, la plante autorisée ne doit pas dépasser un certain taux de THC, cette substance psychoactive responsable de l’addiction. Mais avec l’autorisation de mise sur le marché du CBD pour ses vertus médicinales, la Commission européenne devra rédiger un nouvel arrêté.

On ne peut que se réjouir du renouveau de cette culture aux multiples qualités, mais (car il y a un mais…) son seul défaut reste le prix, encore assez élevé. En effet, le processus de transformation du chanvre est laborieux et 100 fois moins rapide que celui du coton. Et comme le travail du chanvre s’est arrêté pendant 70 ans en Europe, il a fallu rattraper le retard technologique. Alors devinez où sont installées les entreprises aujourd’hui ?… en Chine bien sûr !

Catégories :

0 commentaire

Laisser un commentaire

Emplacement de l’avatar

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous avez aimé cet article ? n'hésitez pas à nous contacter pour partager vos idées