Elle habite dans mon jardin, et quelques autres des plus anciens, depuis si longtemps que je ne connais pas son âge. Ni son nom d’ailleurs. Clara disait qu’elle était déjà là du temps de sa jeunesse…
C’est une pivoine rouge, majestueuse en ce mois de mai (en la regardant, l’expression « rouge comme une pivoine » prend tout son sens). Et c’est un ravissement à chaque floraison, les heureux propriétaires le savent bien. A chaque printemps, je me dis que je vais chercher des traces de son histoire… cette fois, je m’y mets !

Ce n’est pas une histoire que j’ai trouvée, c’est une véritable saga. Tout d’abord, Madame s’appelle Rubra Plena, de la famille des pivoines herbacées. Elle s’est aussi appelée « rose de Pentecôte ». Elle est née dans le sud montagneux de l’Europe et on la connaît depuis l’Antiquité. Son nom vient de « Paeôn », dieu guérisseur grec qui, d’après Homère, se servit d’elle pour guérir Pluton d’une blessure infligée par Héraclès. Le médecin grec Discoride la désigne sous le nom de « pivoine femelle ». Elle devient « officinale » en 1753, car vendue en officine, ou pharmacie (sources : Société des Gens de Lettres, Gallica bnf).

Jusqu’à la fin du Moyen-Age, elle est cultivée dans les jardins de simples (plantes médicinales) des monastères et on la considère comme « grand remède ». Toutes les parties sont faiblement toxiques, mais la racine était renommée comme antiépileptique, antispasmodique et narcotique. Les fleurs ont été prescrites sous forme de sirop jusqu’à la fin du XIXe siècle.
On lui prêtait aussi des vertus magiques : contre les cauchemars, on confectionnait des colliers de germes de pivoines à porter la nuit. On en faisait aussi des amulettes contre l’épilepsie (source: Wikipédia).
Son efficacité médicale n’ayant pu être prouvée, elle n’a plus aucune importance aujourd’hui en médecine, mais elle est encore utilisée en cosmétique et parfumerie.

Au XVIe siècle, la pivoine est toujours rouge. Elle est magnifiquement représentée dans les « Grandes Heures d’Anne de Bretagne ».

A partir du XVIe siècle, d’autres variétés horticoles apparaissent, blanches, roses, et la pivoine devient l’apanage des jardins princiers et royaux, comme celui du roi Henri IV dans lequel la reine Marie de Médicis trouve ses modèles de broderies. Des artistes en font de très belles représentations sur vélin (source : Gallica bnf).

Aujourd’hui, les catalogues des pépiniéristes regorgent de variétés plus belles les unes que les autres, mêlant nos anciennes pivoines herbacées aux superbes variétés chinoises. Mais attention à ne pas négliger notre vieille dame, car la pivoine officinale est inscrite sur le livre rouge des espèces menacées, une variété est même protégée dans les Alpes du sud.

« Vase de pivoines sur piédouche » Edouard Manet -1864, Musée d’Orsay -Paris

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